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Le blog de ACHILLE - Chroniques Notariales

un clerc divorcé qui se noie dans les problèmes de divorce de ses clients

TÉMOIGNAGES.

 

« C'est une chose bien digne de remarque et de réflexion que les récits différents et même contradictoires, faits des mêmes événements par des témoins oculaires. »

Charles Augustin SAINTE-BEUVE, Correspondance.

 

Ma décision est irrémédiable.

« Je suis partie ce premier janvier, me séparant de mon mari, après lui avoir révélé mon infidélité. 

Il pense et dit tout haut à tout le monde que je l’ai quitté pour un autre, que je suis une s…. Il veut garder les enfants, comme on garde le lit quand on est malade. Il est malade d’apprendre ce qu’il savait déjà inconsciemment, ce qu’il ressentait sûrement, enfin je lui souhaite.

Il s’inquiète pour notre patrimoine, la maison, qui va garder la maison, qui va garder le chat, le chien, l’argent, les enfants, qui va me garder moi ? Voilà ce qu’il se dit.

Sa réaction est pathétiquement banale.

Mon infidélité est le seul point qu’il relève, il semble ignorer que ce n’est qu’un fait déclencheur. Il semble ignorer ses torts, ses absences, mes besoins inassouvis, notre manque cruel d’amour, de complicité.

Ainsi, je n’aime plus mon mari, je le quitte, pour vivre, pas pour vivre avec un autre. Depuis longtemps déjà, j’attendais ce déclic, cette onde de choc, qui allait provoquer le séisme.

Nous n’étions plus une famille. 

C’est du moins ce que je ressentais. Je pensais qu’il me trompait, qu’il était mieux ailleurs. Je ne sais plus que penser maintenant qu’il me jure qu’il était fidèle, que c’est moi qui la première aie déchiré le pacte. 

Depuis leur adolescence, mes enfants « vont mal », disputes courantes entre nous, surtout avec le père, injures diverses, autant de blessures morales.

J’aurais voulu qu’on règle cela entre nous deux. Or, mon époux prend nos enfants à témoin, fait du chantage, il leur dit qu’il ne les reverra plus jamais à cause de moi, de mon infidélité.

Je suis allée voir un avocat. J’ai demandé le divorce. Je n’ai pas bien compris. Elle me parle de consentement mutuel, comment faire avec cet époux ?

Il veut aussi divorcer, je suis sûre de cela, mais il veut avoir le beau rôle, c’est moi la sal…. C’est moi qui suis partie, il faut que j’en supporte toutes les conséquences.

Mon Avocate m’a dit d’aller faire une main courante au commissariat de police. Je l’ai fait, tout en trouvant cela glauque. Je ne sais pas de quoi mon époux est capable, me dit mon avocate.

Celle-ci me conseille une requête en divorce acceptée par l’autre, ce qu’ils appellent maintenant le divorce par acceptation du principe de la rupture du mariage. Cependant, mon mari ne veut pas prendre avocat. 

Désolée de vous raconter tout cela, je sais que cela ne vous regarde pas, j’avais juste envie de vous brosser le tableau, autant dire ce que j’ai sur le cœur, avant de parler de qui reprendra la maison.

Que faire pour la maison ? 

Je ne veux pas tout perdre. Nous avons encore un prêt en cours, je n’ai pas les moyens, seule, de le rembourser, même la moitié. Devrons-nous vendre cette maison, mon époux ne peut-il me la laisser et prendre le prêt à sa charge ? 

Gagne-t-il plus que moi ? Oui, un peu, environ six mille euros de plus par an. 

La maison, non je n’ai pas vraiment idée de sa valeur.

Disons pour faire un chiffre, quatre cent cinquante mille euros avec l’explosion du marché immobilier.

Vous pensez que je ne pourrai pas avoir la maison en prestation compensatoire ?

Le prêt ? Il doit rester dessus en capital environ cent mille euros.

Oui, cela fait quatre cent cinquante mille moins cent mille égalent trois cent cinquante mille divisés par deux soit cent soixante-quinze mille euros.

Mon avocat dit que je peux tenter.

Qui ne tente rien n’a rien, vous avez raison. J’aurais cependant voulu savoir comment on calculait cette prestation compensatoire, mon avocate me dit que c’est le juge qui le fait, mais comment, elle ne sait pas.

Vous non plus ? Qui le sait ?

Les juges ? Oui, bien entendu, pourquoi ne le disent-ils pas ?

Personne ne sait donc ? Personne pour me renseigner ?

Quel est votre avis ?

Mon mari ne voudra jamais.

Donc, vous pensez que j’aurai moins de cent mille euros ?

Oui j’ai bien compris que je toucherai cent soixante-quinze mille euros. Mais que toucherai-je de plus sur la partie de mon mari ?

Vous ne voulez pas me dire ?

Vous ne pouvez pas ?

C’était bien la peine que je vous raconte tout cela, mais bon, cela m’a fait du bien après tout, vos anecdotes me rappellent que je ne suis pas seule, que je ne divorce pas pour l’argent. Merci. »

Pour moi, la période la plus difficile…

...fut celle où nous devions vivre sous le même toit avant les mesures provisoires que prend le Juge aux Affaires Familiales dans l’Ordonnance de Non Conciliation.

Moi j’ai été soulagée…

...dès que mon époux m’a dit qu’il demandait le divorce. Depuis, j’ai pu plus facilement lui parler, je dirai même que j’ai pu lui parler alors que cela faisait bien longtemps que nous ne pouvions évoquer un sujet sans nous voler dans les plumes.

Je redécouvre…

...mon mari en toute amitié, comme quelqu’un sur qui je peux désormais compter.

J’ai besoin du titre de propriété…

...des biens immobiliers du couple, des relevés de compte de chacun. Ne vous inquiétez pas je vais les piquer chez ma femme quand elle sera partie ce week-end.

Comment faisons-nous ? Nous avons séparé la maison. 

J’habite dans la cuisine et le salon, ma femme occupe la chambre et la salle de bains. Oui Maître, séparé. 

Comment cela, c'est-à-dire ?

C'est-à-dire que j’ai muré la maison en deux, je suis maçon, il était hors de question qu’on me fasse payer une indemnité d’occupation, Maître. Hors de question ! C’est moi qui l’ai faite cette maison, de mes mains, tous les week-ends, tous les soirs, depuis vingt ans, elle n’est pas encore finie à mon goût. Vous savez, à peine quelque chose est fait qu’autre chose se dégrade. Et elle, la sal… (C’est fou ce que ce mot sévit dans les cabinets d’avocats ou de notaires en matière de divorce…) Elle voudrait des sous ? Jamais ! Elle vivra dedans sa moitié si je ne peux pas faire autrement, mais c’est tout. Oui, je sais, j’ai déjà été condamné trois fois, et alors ? C’est comme cela, ils peuvent bien me mettre en prison, ils ne pourront pas vendre MA maison. 

Les enfants.

Je souhaitais juste vous dire que la pire des choses c’est de prendre ses enfants en otage ou pour de la chair à canon. Ce sont eux qui le week-end me disent ce qu’elle veut me dire. Pourquoi ne pas m’appeler directement, ou même m’envoyer un courrier ou un SMS. Non, elle se sert des enfants comme d’un téléphone.

Le jeu.

Non je ne rentre pas dans le jeu, Maître, je ne réponds pas, elle croit que je m’en tape ! Elle croit que je suis indifférent ? Non je ne lui écrirai pas, qu'elle croie ce qu’elle veut ! Oui je sais, il faut bien que l’on partage les biens. Oui je sais, je ne réponds pas à ses propositions. Oui, je sais, je ne veux pas d’avocat. Je n’en ai pas besoin, je suis propre moi, je n’ai rien fait de mal. Eh bien Maître, vous avez l’air de prendre cela tellement à cœur, vous ferez bien l’intermédiaire au lieu et place de mes enfants ?

* * *

 

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